Paris l’été – vidé de ses voitures et des parisiens pressés – retrouve son charme inimitable qui donne envie de flâner et de se perdre dans les ruelles. La ville retrouve son âme et son authenticité, avec ses terrasses et ses bistrots. Mais Paris l’été c’est aussi la chaleur étouffante et l’humidité. On attend avec impatience la fin de journée, guettant la moindre brise et la chute salvatrice du mercure. C’est dans ces moments-là qu’on bénit l’existence de vins légers, fruités et élégants tels que La Guinguette du domaine de La Roche Bleue.
Sébastien Cornille est un jeune vigneron fort sympathique qui s’est installé en 2007 à Marçon (à une quarantaine de kilomètres du Mans) sur un domaine de 6.4 hectares. Il produit un Jasnières, un Chenin blanc sec et minéral. Amateurs de Meursault et de Condrieu, passez votre chemin! Le Jasnières de Sébastien est minéral, vif, tendu, iodé et sec, mais sans aucune acidité ou « verdeur ». Vous n’aurez donc pas à craindre un déchaussement de dents. Au contraire, un fruit d’une grande délicatesse enrobe la trame minérale et adoucit le vin. Le terroir exceptionnel, le cépage (un des plus grands!) et le savoir-faire du vigneron donnent un vin d’une pureté et d’une finesse sidérantes… capable de vieillir plusieurs décennies.
Mais revenons à La Guinguette, notre chouchou de l’été avec les Herbes Folles de Clément Baraut. La Guinguette est un rouge léger (11.5° d’alcool) à base de Gamay et de Pineau d’Aunis, cépage ligérien connu pour sa finesse et ses notes poivrées. Le Gamay adoucit le vin en lui conférant rondeur et fruité et le Pineau d’Aunis lui donne un côté légèrement épicé et poivré. Tout comme le Pinot Noir, la grande délicatesse du Pineau d’Aunis est à la fois son point fort et son talon d’Achille: mal vinifié, un « Aunis » est tout simplement imbuvable, avec des notes végétales et herbacées. En revanche, donnez une parcelle d’Aunis à un vigneron comme Sébastien Cornille et il en fera une merveille de finesse et d’élégance.
Les amateurs l’ont sans doute remarqué, quand le vin est bon on a envie de l’associer à d’autres émotions: un bon plat, un disque ou un film. Ce soir-là, La Guinguette nous a donné envie de nous replonger dans le Paris nostalgique des Enfants du Paradis, chef d’œuvre de Marcel Carné qui n’a pas pris une ride en 68 ans, avec Arletty (Garance) toujours aussi belle et rayonnante, Jean-Louis Barraut (Baptiste) tendre et émouvant et les dialogues de Prévert géniaux et indémodables.
Grâce à la Guinguette on (re)découvre que le vin est une émotion en soi qui possède aussi le pouvoir magique d’en susciter d’autres…