Paradoxalement, la recherche de nouveaux vignerons talentueux n’est pas sans rappeler la bourse: il faut saisir les valeurs montantes… avant qu’elles ne montent. Voici le dernier jeune champenois que nous avons découvert sur un salon l’année dernière: Aurélien Lurquin, vigneron à Romery (non, pas Pommery!), commune de la Marne située au nord d’Epernay.
Aurélien a démarré son domaine en 2010, labourant ses sols avec un cheval (Tintin pour les intimes). Les deux hectares qu’il cultive depuis 2010 produisent environ 5000 bouteilles, dont certaines cuvées commencent tout juste à sortir du domaine.
Aurélien ne fait pas partie des vignerons qui produisent quelques bouteilles par an pour la beauté du geste. Il cherche à agrandir son domaine tout en gardant la main sur toutes les activités et ce afin de produire des vins sans compromis.
La dégustation des vins est édifiante. Nous avons rarement bu des coteaux champenois de ce niveau. La pureté et l’élégance hissent ses blancs au niveau du coteaux champenois blanc 2010 d’Emmanuel Lassaigne ou des belle cuvées de Benoît Déhu.
Le coteaux champenois rouge 2012 (disponible chez Mi-Fugue) est un assemblage à parts égales de Pinot Noir et de Pinot Meunier issus d’une parcelle dite « Les Crayères ». Les raisins sont éraflés à 90% pour une cuvaison de 21 jours en demi-muid et un élevage de 12 mois en fût. Le résultat à la dégustation est à la hauteur des blancs: le vin est d’une rare densité sans amertume ni dureté. Ceux qui dénigrent l’élevage sur un rouge en alléguant lourdeur, sécheresse ou manque de « fluidité » n’ont qu’à boire ce vin. L’élevage, lorsqu’il est maîtrisé, confère au vin une puissance et une ampleur sans les goûts de vanille ou de « toasté ». Il est forcément adapté à certains types de vins destinés à « voyager dans le temps ». Pour faire simple, trois conditions sont requises pour un élevage réussi: le terroir, le millésime et le savoir-faire du vigneron (choix des fûts et de la chauffe, durée d’élevage…). Vous l’aurez deviné, le vin rouge d’Aurélien n’est pas un vin d’apéritif à picoler entre copains avec une rondelle de saucisson.
A l’ouverture le Pinot Noir domine, avec ses notes typiques de cerise. L’ampleur du vin évoque même un vin de la Côte de Nuits, mais assez rapidement le Pinot Meunier vient se mêler aux arômes de Pinot Noir et le vin exprime des notes d’agrumes (sans amertume!) conférées en partie par le terroir crayeux. La longueur en bouche et la tenue à l’air sont impressionnantes.
Bref, Aurélien Lurquin a signé un grand Pinot au prix d’un Gevrey Chambertin « de base »… qui dit mieux?