Comment rendre le discours sur la biodynamie intelligible? L’auteur, un ingénieur reconverti au métier de vigneron, s’est posé la question sous 35 angles différents.
Expliquer la biodynamie n’est pas chose simple. Antoine Lepetit-de la Bigne a eu la bonne idée de traiter le sujet sous forme de questions, rendant la lecture plus facile, agréable et surtout plus pertinente. Un traité de vinification « classique » se prête en effet à la forme narrative dans la mesure où les choses sont établies. Décrire le processus de fermentation alcoolique ne nécessite (a priori!) aucun questionnement: la réaction chimique est connue.
La biodynamie, au contraire, laisse la place au doute, au questionnement. Tout au long de l’ouvrage l’auteur insiste sur la vision globale de la biodynamie. Contrairement à la viticulture traditionnelle, la biodynamie analyse les maladies de la vigne en termes de déséquilibre et situe les problèmes de la vigne dans un contexte plus large. Du coup, corriger les déséquilibres de la vigne dus par exemple à un excès d’humidité nécessite plus de temps et une approche plus globale qu’un traitement superficiel au sulfate de cuivre. En biodynamie on ne traite pas uniquement le symptôme, mais la cause du déséquilibre, souvent due… aux traitements chimiques!
La biodynamie, comme son nom l’indique, utilise les forces du vivant, et en l’occurence de la plante. Le vigneron, grâce à ses « préparats », aidera donc la vigne à lutter contre les agressions extérieures. Derrière la matière (accessible aux scientifiques) se « cache » donc la notion de force qui n’est pas directement accessible aux cinq sens. L’approche de la biodynamie est donc comparable à la médecine orientale alors que la viticulture traditionnelle ferait plus penser à la médecine occidentale. On revient toujours aux propos – maintes fois cités sur ce blog – de certains vignerons: c’est la somme de petits éléments qui fait un grand vin. Pris isolément, un traitement à la tisane de prêle ne transfigurera pas le vin mais s’intégrera plutôt dans une vision d’ensemble visant à élaborer un vin vivant et vibrant. Pour Lepetit-de la Bigne, la dégustation de ce type de vin nécessite de laisser ses réflexes cartésiens au vestiaire et de ressentir l’émotion communiquée… un discours plutôt étonnant et courageux de la part d’un polytechnicien!
L’auteur explique dans un style clair et accessible à tous l’utilisation du calendrier lunaire, la dynamisation des préparations, l’extension de la biodynamie à la vinification…
Voici, en vrac, quelques questions posées:
– Quelle est la différence entre Bio et Biodynamie?
– La biodynamie permet-elle une meilleure expression du terroir?
– Comment analyser un vin biodynamique: la cristallisation sensible
– Y a-t-il de « mauvais » bios?
– Un vin biodynamique est-il sans soufre?
M. Lepetit-de la Bigne cite souvent les deux apôtres de la biodynamie: Nicolas Joly de la Coulée de Serrant et Anne-Claude Leflaive (Bourgogne). Seul petit regret: l’auteur aurait pu citer d’autres vignerons, mais en 150 pages l’essentiel est abordé…avec conviction et passion.
Bref, il s’agit d’un livre aussi instructif qu’attachant… et un bon complément à la bande dessinée « Les Ignorants » d’Etienne Davodeau.
Introduction à la biodynamie à l’usage des amateurs de vin en 35 questions. par Antoine Lepetit-de la Bigne Editions La Pierre Ronde (156 pages) 18 €