Le vendredi 8 avril Mi-Fugue Mi-Raisin a reçu Michel Autran, vigneron à Vouvray, pour une dégustation et accessoirement pour aider les clients et amis à finir leur semaine en beauté.
Michel Autran est un vigneron « pas comme les autres ». Plus précisément il est néo-vigneron. Pour ceux qui ne sont pas dans le vent, un néo-vigneron est une personne qui abandonne son métier et qui se lance par passion dans le (dur!) métier de vigneron. Michel était médecin généraliste mais l’appel de la terre l’a incité à rendre son caducée et à s’installer sur un demi hectare en 2011 (avec en complément un travail de saisonnier chez les « bons »: Vincent Carême, Les Jousset, Frantz Saumon…) puis 3,8 hectares en 2013. Être néo-vigneron présente plusieurs avantages: on n’est pas formaté par les pratiques de papa et on a forcément envie de se surpasser.
Les clients qui se sont rendus à la dégustation venaient pour la plupart découvrir le personnage et les vins. Michel Autran est de nature plutôt discrète et l’on sent dans l’explication de sa démarche un mélange d’humilité et de conviction… car il est convaincu que le travail de la terre et de la vigne se retrouvent immanquablement dans le verre.
Michel présentait ce soir-là quatre cuvées: deux blancs secs « tranquilles » et deux pétillants.
Les deux cuvées de blanc illustrent merveilleusement l’équivalence entre le « terroir » et la personnalité du vin. La cuvée « Les Enfers Tranquilles » est issue d’un sol d’argiles à silex avec des argiles plus granuleux alors que la cuvée « Ciel Rouge » provient de sols argilo-calcaires avec des argiles plus fines et « boueuses » comme l’argile de poterie. Dans le premier cas (majorité de silex) le sol est plus poreux et plus réactif aux différences thermiques. Il en résulte une vigne plus « nerveuse » alors que dans le cas de « Ciel Rouge » l’argile fine offre une plus grande inertie et la vigne est plus stable et moins vigoureuse. Résultat des courses: la première cuvée est plus légère et plus vive avec de jolies notes citronnées, alors que la cuvée « Ciel Rouge » est plus ample et demandera plus de temps pour se dévoiler. Cette dégustation fut donc révélatrice de la « prise directe » entre un vin et le sol… à condition bien entendu de travailler les sols et de respecter la matière première au chai.
Pour le travail au chai, Michel n’a pas adopté de méthode révolutionnaire: les fermentations démarrent en cuve puis l’entonnage se fait rapidement et deux mois avant la mise en bouteilles le vin est remis en cuve. Aucun ajout se fait à part une dose homéopathique de SO2 indétectable aux analyses (et en tout cas au palais!).
Quant à son pétillant naturel de Chenin « Cap à l’Ouest », il a passé 18 mois sur lattes puis six mois de bouchon pour un vin tout en finesse (et en bon pet’ nat’ qui se respecte il n’a pas vu un seul milligramme de SO2). Le dernier vin dégusté, « Arrête-toi à Kerguelen… » porte le nom de la commune de Belle-Ile-en-Mer où Michel organisait un festival de jazz. Il s’agit d’un pétillant à base de Gamay (80%) et de Chenin, un vin frais et gourmand qui nous a permis de nous rincer la bouche et de nous remettre des émotions d’une belle dégustation…