Les passionnés de vins « vivants » (pour éviter l’épineux terme « naturels »!) connaissent le problème de la Bourgogne: des grands vins mais avec un furieux décollage dans les prix et aucun atterrissage prévu pour l’instant, vu la demande mondiale et les quantités de misère.
Alors que faire quand on aime le Pinot Noir et le Chardonnay? Pour le « chardo » on peut se réfugier dans le Jura et pour le Pinot Noir en Alsace ou en Loire. Mais le terroir bourguignon est unique et l’amateur de frissons doit casser sa tire-lire pour un joli Pinot: boire un coup, oui, mais à 40€…pas tous les jours.
Finalement la Bourgogne ressemble un peu à Paris: le centre étant devenu très (trop?) cher, il faut aller voir ce qui se passe en périphérie. Et là, nous sommes de plus en plus gâtés entre le nord (Chablis, Vézelay, Irancy…) et le Mâconnais au sud.
C’est simple: si vous voulez boire un grand blanc qui pulvérise 99% des vins de Meursault, essayez la cuvée « Aragonite » du jeune Julien Guillot (Clos des Vignes du Maynes)…ou les vins d’Alexandre Jouveaux, vigneron aussi discret que talentueux et dont le domaine situé à Uchizy (au nord de Mâcon) commence à faire du bruit. Certes, nous sommes pas sur les mêmes notes « beurrées », mais plutôt sur une tension et une pureté qui vous rappelle un peu les grands vins blancs ouillés du Jura.
Alexandre est un vigneron humble et discret. Il n’aime pas parler de son cheminement mais préfère laisser parler ses vins. Nous l’avons quand même interrogé pour savoir ce qui se cachait derrière des vins aussi complexes qu’émouvants. Voici sa réponse:
« Mon travail dans la vigne à pour but d’avoir un végétal vivant et sans trompe l’œil. Les sols sont bêchés dès les premières chaleurs de l’année pour donner de la vigueur aux vignes. Ensuite, les herbes prennent place pour installer un équilibre et sa biodiversité. Pas besoin de faire plus compliqué. »
Alors oui, ça a l’air simple de faire des grands vins, sauf que derrière cette simplicité apparente se cache un travail colossal et un questionnement permanent. Tout le monde sait que l’idée de vigneron « fainéant » qui laisse faire les choses est une boutade. D’ailleurs, si c’était le cas tous les vignerons « classiques » se seraient convertis depuis belle lurette!
Au niveau de la vinification Alexandre prône la même simplicité:
« La récolte, faite en caisses de 10kg est directement versée dans un pressoir hydraulique busher. Le jus obtenu est tout de suite logé dans des foudres de 1200 litres. Aucune intervention jusqu’à la mise en bouteilles. Elle sera faite manuellement et par gravité. Le but est d’arriver à des vins jeunes et sauvages à la mise. »
… mais « sauvage » ne signifie nullement rustique ou grossier. Bien au contraire, les vins du domaine atteignent depuis quelques millésimes des sommets de finesse et de pureté. A l’ouverture les vins blancs sont plutôt discrets mais l’air révèle peu à peu la complexité et les arômes. Comme toute chose faite avec amour, les vins d’Alexandre demandent de la patience. Nous déconseillons la carafe car l’aération vous priverait d’une expérience fascinante: « accompagner » le vin à travers ses différentes phases d’ouverture. Le dernier vin dégusté, la cuvée « O12″ (vous aurez deviné le millésime), est une expérience hors du temps: au bout de deux heures la maturité des raisins fait ressortir des notes de raisins de Corinthe, avec une trame minérale persistante. Ce vin rappelle un grand Chardonnay d’Overnoy. Inouï!
La cuvée de Pinot Noir et Gamay, l’Orme, est du même niveau, avec une fraîcheur et un fruit sidérants.
Alexandre conclut en disant : « j’aime ces vins qui se goutent comme les saisons ». Une chose est sûre: chez Mi-Fugue nous en gouterons de janvier à décembre…
Les cuvées disponibles: En blanc: Combarnier 2013, Prety 2013 (bouteille et Magnum), O12 En rouge: L’Orme 2013